L’agriculture naturelle est une démarche dont le but est d’obtenir un sol le plus vivant possible, en essayant de limiter au maximum les interventions mécaniques ou humaines. La culture naturelle exige qu’aucun labour ne soit effectué. De même, très peu de fumure ou de compost sont apportés au sol car, à partir de certaines pratiques, on risque de déranger la microflore et la microfaune locales.
Ces méthodes culturales anciennes ont été remises au goût du jour dès le siècle dernier, alors que les formations professionnelles classiques ne parlaient encore que de culture plein champ ou de labour. Un microbiologiste japonais du nom de Masanobu Fukoaka a ouvert de nombreuses pistes de réflexion en prônant la non-culture et en laissant faire la nature sur des expérimentations à grande échelle, que cela soit au Japon ou par la suite aux Etats Unis. La technique a été affinée par des gens comme Lydia et Claude Bourguigon qui ont approfondi le sujet dans leur chaire à l’Université de Montpellier. Ces idées ont fait du chemin et beaucoup d’agriculteurs adoptent ces méthodes un peu partout dans le monde, la permaculture n’en étant qu’un exemple.
Il appartient à chacun d’adapter sa méthode, le principe étant d’essayer d’obtenir un sol le plus vivant possible, l’énergie libérée par celui-ci prenant le relais de celle qu’on pourrait dépenser sous toutes les formes que l’on a aujourd’hui coutume d’employer. Ainsi, au domaine, toutes nos vignes sont enherbées toute l’année et si en été nous pratiquons des tontes d’herbe après l’épiaison, en hiver ce sont des brebis qui vont pacager dans les parcelles. Les plantations se sont faites systématiquement sur des sols non travaillés, à coup de pioche et barre à mine, afin de ne pas perturber la microflore présente. Par la suite, les sols ne sont que rarement travaillés, avec un griffage superficiel pour limiter le compactage de la terre.
Depuis des années cet ensemble a trouvé son équilibre mais nous intervenons quand même manuellement pour le palissage afin de canaliser les branches comme il faut. Nous minimisons les apports de fumure car nos terroirs secs de calcaires de 250 millions d’années, qui datent du trias, sont naturellement bien pourvus en calcium et oligo-éléments. Un ajout de fumier, même bien composté, amènerait d’autres micro-organismes qui risqueraient entrer en antagonisme avec ceux existants in situ. Sur un terroir, il faut laisser faire les choses plutôt que de vouloir imposer. L’humus nécessaire pour la minéralisation est en grande partie fabriqué naturellement par la vie microbienne qui découle de l’enherbement total, les sarments de moins de deux ans étant restitués au sol par girobroyage, les autres étant ramassés et retirés de la parcelle.
En ce qui concerne les traitements, nous n’utilisons que du soufre et de la bouillie bordelaise, en faible dosage, en dessous des 4kg cuivre/ha tolérés en certification Agriculture Biologique. Moins on traite, moins on envoie de produits phytosanitaires sur la vigne, mieux elle se comporte car elle ne reçoit pas toutes ces populations étrangères de levures ou bactéries qui, à cause des résidus laissés, finissent par contaminer la plante. Seul un raisin parfaitement sain pourra rendre l’expression d’un terroir.